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Cette page est précédemment parue dans le Bulletin Numismatique n°180

 

Mais qui est M. Marchais ?

     Cette question qui taraude les numismates depuis longtemps et que l’on croyait résolue mérite d’être à nouveau posée. Emile DEWAMIN en 1893, Victor GUILLOTTEAU en 1943 et Jean MAZARD en 1969 [1] ne le désignent que par son nom propre. Victor GADOURY, dans sa première édition de 1973, de « Monnaies Françaises » n’est pas plus disert. Dans leur édition de 1976, Jean de MEY et Bernard POINDESSAULT indiquent dans leur Répertoire de la numismatique Française contemporaine : « les émissions de Bordeaux, comportant un M en creux dans une étoile à six branches, ont été frappées à l’aide de coins supplémentaires réalisés par un graveur local dénommé MARCHAIS après usure des coins officiels ».

     L’article de Frédéric DROULERS sur la monnaie de Bordeaux [2] parait en 1999. Selon cet auteur, MARCHAIS ne serait autre que Charles MARCHANT DUPLESSIS, nommé Contrôleur au Monnayage à Bordeaux le 6 septembre 1870 par la commission des Monnaies et Médailles [3], fonctionnaire détaché de Paris où il occupait la fonction de Contrôleur à la fabrication des Médailles. C’est ainsi qu’apparait Charles MARCHAIS dans les ouvrages numismatiques.

      Après un important travail de recherches effectuées aussi bien dans les archives de Bordeaux que dans les documents du Centre des archives économiques et financières de Savigny, ce site jette un nouvel éclairage sur M. MARCHAIS : le procès-verbal du Conseil des Finances [4] mentionne « M. Marchais, graveur ». Sa qualité de fonctionnaire de la Monnaie aurait été indiquée si cela avait été le cas. De plus aucun dossier administratif n’a été retrouvé à son nom. Dans le registre de fabrication de Bordeaux [5], il est écrit « M Marchais » à la main, pour la première utilisation des coins au M datée du 10 novembre 1870.

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     En 1871, le procès-verbal de difformation des coins au M [6] indique qu’ils ont été « fabriqués à Bordeaux par M. Marchais ».

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     D’autre part, dans tous les documents relatifs à Charles Marchant Duplessis (dossier administratif, nom dans les registres, frais de missions…) l’orthographe de son nom est toujours écrite correctement avec parfois omission de Duplessis. De plus il n’est jamais mentionné la moindre formation de graveur (il est né le 15 août 1825 et est embauché comme contrôleur adjoint au monnayage à Paris le 12 octobre 1847). Enfin le cumul de deux fonctions parait impossible.

 

     Mais alors qui est M. MARCHAIS. La réponse est sans doute connue depuis 1916 et figure dans le fascicule intitulé « Un siècle de numismatique Bordelaise (1774-1878) extrait de la Revue Philomathique de Bordeaux écrit par Ernest LABADIE [7], bibliophile et collectionneur bordelais :« Mais, à cette première frappe, le matériel de l’atelier étant en mauvais état, les coins de Barre vinrent à se briser, et on réquisitionna de suite le graveur bordelais, M.Marchais, pour les regraver. »

Plus loin il indique : « Cette partie de la numismatique bordelaise de 1870-1871 que nous venons d’exposer est peu connue, nous en tenons presque tous les détails du graveur bordelais lui-même, M. Marchais. »

     M. Marchais (M. pour Monsieur) était donc un graveur local bordelais réquisitionné par Henri-Archange DELEBECQUE (Directeur de la fabrication à la Monnaie de Bordeaux) pour faire fonctionner son atelier de fabrication de coins dont la demande d’autorisation du 14 septembre 1870 avait été refusée par le Graveur Général, celui-ci  n’ayant pas de personnel à mettre à disposition. [8]

     Sur ces indications, des recherches dans les archives d’état civil de Bordeaux [9], depuis peu en ligne, ont permis de retrouver plusieurs familles du nom de MARCHAIS. Le seul candidat sérieux est Bertrand MARCHAIS, Graveur, 33 ans en 1870. Né le 4 septembre 1837 à Bordeaux, marié en 1867, père de deux filles (1869 et 1871), veuf en 1877, puis remarié en 1878, décédé le 4 décembre 1913, trois ans avant la publication de Labadie [7]. A partir de 1867, tous les actes d’état civil le concernant comportent la mention de sa profession.

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     C’est ainsi que nous pouvons dire avec une forte probabilité que Bertrand MARCHAIS (1837-1913) est le graveur Bordelais qui fut réquisitionné en 1870 et 1871, à l’âge de 33 ans, pour confectionner les coins au M à l’atelier dédié à l’Hôtel des monnaies de Bordeaux et dont le matériel nécessaire avait été acquis par Henri-Archange DELEBECQUE. [10]

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Références

[1] Emile DEWAMIN, Cent ans de numismatique Française (1893) – Victor GUILLOTEAU, Monnaies Françaises, Colonies Métropole ,1774-1942, (1943) - Jean MAZARD, Histoire monétaire et numismatique contemporaine 1790-1967, tome II (1969)

[2] Numismatique et Change n°295 (juin 1999)

[3] Centre des archives économiques et financières de Savigny, Fonds d'archives de la Monnaie de Paris, série X registre Ms216

[4] Centre des archives économiques et financières de Savigny, Fonds d'archives de la Monnaie de Paris, série 1E-0000040 (séance du 6 janvier 1871)

[5] Archives départementales de la Gironde, Fonds de l’Hôtel des Monnaies de Bordeaux, série 7P/130

[6] Centre des archives économiques et financières de Savigny, Fonds d'archives de la Monnaie de Paris, série F9-0000002/4

[7] Ernest Labadie. Un siècle de numismatique Bordelaise (1774–1878), Bordeaux 1916. Fascicule extrait de la revue Philomathique de Bordeaux.

[8] Centre des archives économiques et financières de Savigny, Fonds d’archives de la Monnaie de Paris, série F9-0000002/6

[9] Archives Bordeaux Métropole cote 2 E 266

[10] Expertise de 1875 avec détail des dépenses effectuées en 1870 afin de remettre en état les ateliers. Centre des archives économiques et financières , Fonds d’archives de la Monnaie de Paris, série F9-0000002/5

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